Les vœux du Président pour 2023
Flash-back sur l’année écoulée
Chers Amis, Chers Collègues,
L’année 2022 qui vient de s’écouler a été spéciale pour notre association Neurodys-PACA , spéciale et importante à plus d’un titre. Bien entendu, tout d’abord, par le caractère hautement symbolique de la célébration du 20e anniversaire de sa création, lors d’un colloque haut en couleurs et riche scientifiquement qui s’est tenu le 1er juillet au Château de la Buzine. Ce fut l’occasion de réunir, dans un cadre à la fois révélateur de notre identité régionale et propice à favoriser les échanges, plus de 200 spécialistes venus de toutes les régions de France et au-delà, autour d’un thème inédit, celui de la prévention des troubles d’apprentissage et du neurodéveloppement. Ce fut également le moment solennel d’affirmation de notre nouvelle identité, au-delà du réseau de santé Résodys qui nous a longtemps caractérisés, devenu Neurodys-PACA, une véritable institution régionale consacrée aux troubles cognitifs et du neurodéveloppement.
L’année 2022 a également été l’occasion d’expérimenter une nouvelle gouvernance élargie à l’ensemble de la région PACA, soit du Vaucluse jusqu’aux Alpes Maritimes, à travers une alliance forte avec nos collègues du CHU de Nice, concrétisant ainsi des liens tissés de longue date mais jusqu’alors restés officieux, mais surtout rétablissant un équilibre injustement asymétrique entre une région marseillaise doublement pourvue d’un CERTA et d’un réseau de soins, alors que le CERTA de Nice devait jusqu’ici assumer les deux fonctions. L’année 2023 devrait donc voir la mise en fonction de ce nouveau dispositif rendu de la sorte plus homogène et plus efficace en accédant à une dimension régionale.
PCO : une nouvelle mission pour Neurodys-PACA
Mais il n’aura échappé à personne que 2022 a également, et peut-être surtout, été l’année où les troubles d’apprentissage, autrement appelés dans notre pays TSLA, ou encore « troubles dys », sont officiellement entrés dans le cadre des troubles du neurodéveloppement, de par la première application de la volonté de nos gouvernants d’élargir à la tranche d’âge de 7 à 12 ans les bénéficiaires du « Forfait d’Intervention Précoce », inhérent au fonctionnement des plateformes de coordination et d’orientation (PCO).
Ces dernières, créées en 2018 sous la houlette d’une délégation interministérielle dite « autisme au sein des TND », étaient initialement réservées aux enfants de moins de six ans, et jusqu’ici largement consacrées à l’autisme : elles garantissent à présent l’accès à la gratuité du diagnostic multidisciplinaire à toutes les familles dont les enfants relèvent du cadre beaucoup plus large des troubles Dys (ce qui n’était pour eux jusqu’ici qu’une « dérogation »).
Cette volonté, exprimée par la voix du Président Macron, lors de la Conférence du Handicap en février 2020, ( je cite « les plateformes TND et le forfait précoce s’adresseront dorénavant également aux enfants de 7 à 12 ans : au-delà de l’autisme, ces forfaits seront ouverts à tous les dys : dyslexie, dyspraxie, etc… »), a de facto propulsé en première ligne notre association dans l’actualité de ces nouveaux dispositifs réglementaires que sont les Plateformes TND.
Dans notre région, le déploiement de ces plateformes 7-12 ans, prévues pour couvrir tout le territoire département par département, a suivi celui des plateformes autisme, soit en premier lieu les départements du Var et des Alpes Maritimes, puis celui des Bouches du Rhône et enfin les trois restants : 84, 04 et 05.
Neurodys PACA a choisi de s’associer activement à la mise en place de cette seconde vague de dispositifs, d’une part en devenant partenaire dès 2022 des PCO 7-12 du 83 et du 06, les premières à avoir ouvert leurs portes, et d’autre part en proposant d’être nous-mêmes porteurs de la plateforme dans les Bouches du Rhône, pour une mise en route en mars 2023 (rappelons que la PCO 0-6 ans, dans notre département, est portée par l’Hôpital Valvert et ses équipes spécialisées dans l’autisme). Nous avons tout récemment reçu de l’ARS la mission de porter cette plateforme 7-12 du département : plus particulièrement, c’est le SESSAD de NeurodysPACA qui est désigné comme la structure porteuse.
Il est clair que cette ouverture vers les PCO nous amène à une réflexion profonde, qui a déjà largement débuté avec nos partenaires institutionnels et avec notre tutelle, l’ARS PACA, sur la place des troubles dys vis-à-vis des autres TND, réflexion qui se dessine déjà en deux directions. D’une part, et c’est là une tendance assez générale observée par les spécialistes de la question, la problématique de l’autisme devient de plus en plus présente chez les enfants et adolescents consultant pour difficultés scolaires, au point de modifier l’arsenal diagnostique et thérapeutique de nos professionnels de l’apprentissage pour inclure des outils spécifiques à la détection et à la prise en charge des traits autistiques éventuellement associés au trouble d’apprentissage.
De même, la recherche scientifique évolue elle aussi vers une conception plus inclusive des TND, qui ferait de l’autisme, ou au moins certaines formes de celui-ci, notamment celle anciennement dénommée « syndrome d’Asperger », une des manifestations d’un continuum au sein des TND, voire une forme à part entière de trouble dys.
D’autre part, et à l’inverse, il existe toute une série d’arguments soulignant la différence fondamentale entre les troubles dys et les autres TND, notamment l’âge de survenue mais également les mesures à prendre, y compris en matière de prévention. Ainsi, il est largement reconnu que l’autisme se doit d’être repéré le plus tôt possible dans la vie de l’individu, et c’est même là la raison d’être principale, du moins initialement, des plateformes TND.
Or, il n’en va pas de même pour les troubles dys dans leur grande majorité, qui ne se manifestent que lorsque l’enfant entre à l’école primaire, et pour lesquels l’attitude préconisée est au contraire d’attendre l’effet de la mise en place par l’équipe enseignante des premières mesures d’intervention pédagogique avant même d’envisager d’orienter l’élève vers une démarche de diagnostic.
Il en va de même pour la déficience intellectuelle, plutôt diagnostiquée avant 6 ans, et pour laquelle les mesures à prendre sont très différentes, voire diamétralement opposées, à celles préconisées pour les troubles dys, tant en termes d’interventions thérapeutiques que d’orientations pédagogiques.
Enfin, et ce n’est pas là la moindre des différences au sein des TND, la fréquence de survenue dans la population des différents troubles est considérablement inégale : de 1à 3% pour l’autisme et la déficience confondus contre 10 à 15% de la population d’une tranche d’âge pour les troubles dys. Il est clair que cette différence au niveau populationnel va impliquer des réflexions et des mesures en matière de politique de la santé forcément très différentes.
Une expérience précieuse pour l’ensemble du système de soins
Ainsi, et en adoptant volontairement une position très pragmatique de professionnel de terrain, on se dirigera très logiquement vers deux philosophies distinctes selon l’âge des enfants concernés : un dispositif de repérage et d’intervention précoces pour l’autisme et la déficience intellectuelle, tout naturellement représenté par les PCO 0-6 ans, et un dispositif de sélection et de gradation des interventions, beaucoup plus proche de nos pratiques dans les unités du réseau de santé Résodys, qui sera typiquement le rôle des PCO 7-12 ans.
Le premier a vocation à ne laisser sans solution et sans diagnostic aucun trouble repérable dès la petite enfance ; le second à donner à toutes les familles d’enfants rencontrant des difficultés d’apprentissage, qu’elles soient ou non accompagnées d’altérations dans les domaines psycho-affectifs, la possibilité d’accéder à un diagnostic précis des raisons de ces difficultés. Dans les deux cas, c’est l’accès au diagnostic qui est donc visé, mais avec des moyens et selon un tempo très différents entre les deux tranches d’âge.
En pratique, notre rôle, en tant que spécialistes des TND dans la tranche d’âge des 7-12 ans, sera de contribuer à adapter le puissant outil que constitue le dispositif PCO/forfait précoce à la problématique des troubles dys, avec ses spécificités cliniques, pédagogiques, mais aussi démographiques.
Un programme riche et passionnant qui débute dès ce premier trimestre 2023 par une série de concertations avec nos partenaires et notre tutelle.
A ces réflexions, nous souhaitons associer le plus largement possible l’ensemble des professionnels libéraux qui seront la clé du fonctionnement harmonieux de ces structures, comme ils l’ont été depuis la création de notre association : des partenaires privilégiés garants de l’homogénéité et de la qualité des soins sur notre territoire.
Neurodys et l’École : une préoccupation toujours vivace
Conformément à l’action de notre association depuis toutes ces années, nos autres partenaires privilégiés sont les professionnels de l’éducation, publique comme privée, avec qui nous avons tissé de longue date des liens étroits à tous les niveaux de la hiérarchie, depuis l’enseignant en salle de classe, premier témoin et, de ce fait, acteur majeur du parcours de l’enfant dys, jusqu’aux instances académiques et départementales de l’Education nationale, avec qui nous œuvrons au quotidien pour le bénéfice des enfants à besoins pédagogiques particuliers. La période qui s’ouvre va plus que jamais reposer sur l’efficacité et la transparence de ces liens santé/éducation, d’autant que le mode de fonctionnement des PCO 7-12 ans fait référence de manière explicite, et plus prononcée que pour la PCO 0-6 ans, au rôle de l’enseignant tant pour l’adressage des enfants dont les besoins auront été repérés que pour la réception et l’utilisation des données issues des analyses réalisées au sein de la plateforme.
Pour ce faire, nous aurons à démultiplier encore plus que par le passé nos efforts de communication et d’échanges avec le secteur de l’enseignement, une démarche qui va également commencer incessamment dès ce premier trimestre de l’année qui débute. Il est clair que cette étape sera facilitée par tous les efforts qui ont été consentis par nos équipes ces dernières années en matière d’accompagnement des enseignants dans la démarche de prévention. C’est ainsi que des liens forts et diversifiés ont été tissés avec les établissements du département et au-delà, par exemple dans le cadre des « Cités Éducatives » visant les élèves de primaire et de collège dans les secteurs dits « politique de la ville », ou encore REP et REP+.
Plus largement, c’est en terme d’appui aux professionnels qu’il nous est demandé d’agir, ce que nous avons largement commencé à faire grâce à notre organisme de formation, Formadys, qui a obtenu l’année dernière l’accréditation Qualiopi et qui a renforcé son équipe de formateurs par l’apport des collègues de la région niçoise. Mais sans doute aurons-nous à recentrer notre action sur le domaine du soin, tout en gardant à l’esprit le rôle crucial de l’école dans le bien-être et la santé des enfants en difficultés d’apprentissage.
Par exemple, nous aurons à cœur de développer au cours de l’année à venir les outils rééducatifs ayant fait leurs preuves d’efficacité sur les troubles de la lecture, de l’écriture et du calcul et utilisables en milieu scolaire, comme la rééducation cognitivo-musicale (Mélodys) ou encore des « serious games » informatisés come Mila dont nous avons participé au développement et à la diffusion dans les milieux orthophoniques. A terme, la présence de professionnels de santé au sein des établissements scolaires (hormis bien entendu les médecins scolaires, malheureusement en nombre insuffisant), sera tôt ou tard un objectif à atteindre.
La question centrale des médecins experts
Mais l’enjeu majeur, pour l’année à venir, sera de susciter de nouvelles vocations parmi nos confrères et consoeurs médecins afin d’augmenter le nombre d’experts des troubles dys, aptes à coordonner et piloter des équipes, formelles ou informelles, de spécialistes de différentes professions paramédicales.
Nous développons ainsi prioritairement, avec Formadys, des actions de formations aux TND de ces médecins dits de niveau 2, mais aussi envers les médecins de niveau 1, devenus des acteurs indispensables du parcours de soins des troubles dys, depuis l’extension des PCO aux 7-12 ans. Une sensibilisation de nos confrères via le Conseil de l’Ordre a eu lieu en fin d’année dernière, mais l’effort de communication et de formation doit impérativement être poursuivi. Nous nous inscrivons également dans une campagne nationale de formation aux TND sous l’égide de la Délégation Interministérielle, de l’Agence nationale du DPC et de la Fédération française des dys.
Ainsi, plus que jamais, NeurodysPACA va immanquablement et inexorablement poursuivre son action dans toutes ces directions, et parfaire ainsi son image de défenseur de la pluridisciplinarité auprès de l’ensemble de ses partenaires, qu’ils soient professionnels du soin (en libéral ou en établissement), de l’école publique et privée, et de leurs administrations respectives.
A tous, je souhaite une année riche en découvertes, échanges et accomplissement personnel et professionnel.
Michel Habib
Président, Neurodys-PACA